A PROPOS DU SENS DU RYTHME CHEZ L'AFRICAIN
" Je me suis toujours demandé sur quoi se fondait cette affirmation
selon laquelle l'Africain aurait un sens inné de l'art. On doit
penser, en le disant, au sens du rythme des danses africaines, peut-être
? On ne peut pas si facilement généraliser en partant d'une
constatation faite dans un secteur déterminé, celui de la
danse, je ne dirais même pas celui de la musique…Car il n'
y a pas plus de raison de lui trouver un sens inné du rythme, si
par rythme on entend toutes sortes de rythmes. Doit-on dire que les Indiens
n'ont pas le sens du rythme parce que leur musique est toute aérienne, évaporée, éthérée
? Il y a dans le monde une polyrythmie et l'homme le plus libre et le plus
capable de le demeurer est celui qui est apte à s'adapter à tous
les rythmes, à les comprendre et à les aimer. Je crois que
tous les peuples sont doués pour l'art, à commencer par les
peuples primitifs qui ont couvert de leurs peintures, les parois des grottes
qu'ils habitaient "
Considérations Actuelles sur l'Afrique
Editions CLE Yaoundé 1983, page 74
A PROPOS DE LA STATUETTE AFRICAINE
" Je ne suis pas sûr que la statuette soit l'expression d'une
certaine recherche du beau. Je pense au contraire, et c'est une hypothèse
de ma part, que c'est une idée ( pour ne pas dire c'est l'idée)
que le sculpteur cherche à concrétiser…La statuette
est une réalité vivante, et vivante grâce à l'idée
qui l'habite. On peut comprendre pourquoi les objets d'art ont souvent
trouvé leur place dans la vie active quotidienne, soit à titre
d'objets entrant dans des rituels déterminés de cultes et
pratiques magico-religieuses, soit à titre de simples ustensiles
domestiques".
Considérations Actuelles sur l'Afrique
Editions CLE Yaoundé 1983, page 76
SUR LA SIGNIFICATION DU BEAU DANS L'ART TRADITIONNEL DE LA DECORATION
AU CAMEROUN
" Nous avons l'impression que l'un des critères du beau se
trouve être d'ordre quantitatif. En effet, pourquoi le simple fait
d'être décoré suffit-il à conférer la
beauté à la calebasse, compte non tenu des motifs de décorations
? La réponse semble être que la décoration vient ajouter
quelque chose à la calebasse ; ce qui est ajouté s'entend
en termes de quantité d'être. Par sa décoration, l'objet
reçoit comme un supplément d'être et c'est en cela
qu'il est beau. Avec cette indication, il devient facile de saisir la différence
entre plusieurs objets décorés, c'est-à-dire entre
plusieurs beaux objets. C'est la plus ou moins grande quantité d'être
surajoutée à l'objet qui fait dire que ceci est plus beau
que cela : diversité des motifs, pluralité de coloris vont
dans le sens d'un plus grand effet esthétique "
Jalons III ( Problèmes Culturels)
Editions CLE, Yaoundé 1986, page 54
LE
BEAU, LA PUISSANCE, LE MAGIQUE …
" Ainsi, entre le siège orné de perles et celui demeuré totalement
nu, entre l'objet d'art et le simple ustensile, la distance semble être
celle qui sépare le riche du pauvre, le puissant du faible, le bien-vivant
du mal-vivant. Et derrière l'idée de puissance on trouve
celle de " valeur magique ".
Jalons III (Problèmes Culturels)
Editions CLE, Yaoundé 1986, page 57
LE BEAU DANS LA NATURE
" Le Négro-Africain perçoit le beau dans les créations
de la nature ; mais il le perçoit comme étant chaque fois
la manifestation d'une importante concentration de l'être, c'est-à-dire
la manifestation d'une importante concentration de la puissance de l'être.
En effet, qu'est-ce qu'un bel oiseau de couleur ?C'est un oiseau qui, par
la richesse des coloris de son plumage, recèle une certaine puissance
qui pourrait aussi se manifester par l'utilisation de ses plumes dans le
traitement de telle ou telle maladie ".
Jalons III (Problèmes Culturels)
Editions CLE Yaoundé 1986, page 54-55
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