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Extraits de quelques oeuvres Jalon 1

EXTRAIITS de JALONS I (Recherche d’une mentalité neuve)

 le rêveur contestataire passif
 la contestation pour la contestation
 la contestation du capitalisme en Afrique
 Peut-on préparer l’avenir pour des générations futures ?
 L’art, la morale, la contestation

LE REVEUR CONTESTATAIRE PASSIF

« Le  rêveur contestataire passif est conscient du fossé qui sépare à tout instant son être actuel de son être projeté, le désordre existant de l’ordre devant être. Mais ce fossé ne l’intéresse pas, ou ne l’intéresse que très peu, car c’est un fossé  qui ne se comble que de volonté et d’action ; c’est précisément pour cette raison qu’il ne l’intéresse pas. Il veut un certain état de plénitude, un mieux-être, mais ne veut pas l’action qu’implique ce premier vouloir ; il veut un certain ordre, une certaine justice, mais ne veut pas l’engagement agissant qu’implique ce premier vouloir. Quand d’ailleurs je dis qu’il veut la plénitude, le mieux-être, l’ordre, la justice, je m’abuse : il conviendrait que je dise plutôt qu’il désire ce mieux-être, cette plénitude, cette justice, etc.. Car la véritable volonté entraîne nécessairement l’action ; là où il n’y a pas d’engagement dans l’action, on ne peut parler que de désir. Aussi, dire qu’un homme veut une situation mais ne veut pas l’action devant contribuer à faire être cette situation, c’est identiquement dire que cet homme ne veut pas sa volonté et se renie par là-même.
            Le rêveur contestataire passif est celui qui se complaît dans le formalisme de la contestation. Il croira son verbe doué d’une vertu créatrice qui l’apparenterait à celui du Dieu de la Genèse. Il lui faudrait en effet avoir la toute-puissance de ce Dieu pour que la moindre de ses intuitions soit suivie de l’apparition d’un phénomène dans le monde. Or, il n’est pas doué d’une telle toute-puissance ! Pire, il se situe exactement à l’opposé de la toute-puissance, dans l’impuissance et la passivité. Et il y a chez lui quelque chose comme une secrète attente du secours de la providence. Il se contente de concevoir des projets, d’élaborer des programmes, la providence ou Dieu se chargerait de leur réalisation. Dans le fond, le rêveur contestataire passif est un enfant ; car, comme l’enfant, il est un être de désirs ; il n’a que des désirs. De même qu’il attend passivement que la providence agisse à sa place, de même l’enfant attend de son entourage qu’il veuille ce que lui désire ; il crie, pleure, frappe le sol du pied, ce qui est une manière pour lui de transformer magiquement son désir en commandement ou plutôt de suppléer son déficit de volonté par un détour magique. S’il arrive que l’entourage donne satisfaction à l’enfant, il n’en va pas de même de l’adulte rêveur-contestataire qui entend faire jouer à Dieu ou à la providence le rôle que l’entourage joue pour l’enfant. S’il est normal que l’enfant s’en remette à l’entourage du soin de convertir ses désirs en volonté, comment comprendre que l’adulte, qui sait qu’il n’est adulte que parce qu’il a franchi le stade du désir et de la prière coupés de l’action réalisatrice, le stade de la dépendance à l’égard d’une volonté adjuvante extérieure, continue de se comporter comme un enfant ? »
JALONS I ( Recherche d’une mentalité neuve), Ed. CLE, Ydé. 1970, p.8-9

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LA CONTESTATION POUR LA CONTESTATION

« Dans un article de Tanneguy  Quénétain intitulé « Les étudiants contre la société » et publié dans la revue Réalités, en août 1969, j’ai pu lire ceci : ‘Si l’Administration d’une université accorde aux étudiants tout ce qu’ils demandent, la bagarre sera-t-elle évitée ?Pas nécessairement. Ainsi, à l’université de Tokyo, en janvier dernier, c’est après que tout le programme de reforme exigé par les étudiants fut agréé, qu’un groupe de contestataires appartenant au Zengakuren, s’enferma dans les bâtiments. La bataille avec la police fit de tels dégâts que l’université dut être fermée. Et que penser de ce cri d’un étudiant gréviste romain à qui l’on demandait ce qu’il réclamait : « Pas de demandes, pas de délégations, pas de tractations, pas de dialogue ! L’occupation se poursuit. Le combat n’a pas d’objectif, il est l’objectif »…Ici donc, ce ne sont pas les programmes qui intéressent le contestataire, ce n’est pas à proprement parler la justice, l’ordre ou d’autres valeurs à concrétiser qui intéressent le contestataire mais la contestation en tant que telle. « Le combat n’a pas d’objectif, il est l’objectif » dit l’étudiant romain. Et si j’oppose l’activité de cette attitude à la passivité de la première c’est, vous le voyez bien, parce qu’il y a combat ; il y a destruction effective de ce qui est, destruction de l’ordre existant ; au nom de quoi se fait la destruction ? Au nom de rien, je veux dire au nom de rien qui puisse se proposer en substitution à ce qui est combattu et détruit. La contestation prise comme fin en soi se présente comme non-constructive. »
JALONS I (Recherche d’une mentalité neuve), ED. CLE, Ydé. 1970, pp.10-11

 

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LA CONTESTATION DU CAPITALISME EN AFRIQUE

« …force nous est de reconnaître que la contestation de demain se prépare aujourd’hui, dans les choix qui sont en train d’être faits ça et là en Afrique, dans les orientations données ça et là au développement. Je ne m’attarderai pas sur la question de savoir s’il est juste ou non de dire que le capitalisme est responsable de la vague de contestations qui a déferlé sur le monde ces derniers temps. Je considère le seul fait suivant : nos sociéts sont en train d’être engagées dans la voie du capitalisme. Chacun peut lire pour soi les analyses de Karl Marx. Le capitalisme comporte ses contradictions et c’est à partir de celles-ci que se déclenche la contestation. Que vaut l’humanisme capitaliste ?Telle est la question que chacun de nous doit se poser en ce moment précis où nous nous sentons placés comme à un carrefour crucial de notre histoire. Je pense quant à moi que ce n’est qu’une caricature de la liberté qu’on peut trouver dans toute société où l’on stimule les instincts les plus bas de l’homme en le lançant dans cette entreprise  d’accumulation des biens qui ne peut que le rendre dur à l’égard de ses semblables, âpre au gain, méchant et inhumain.. Demain, nous aurons une société où une catégorie de citoyens, parce que rusés, impitoyables et sans scrupules, possèderont tout, tandis qu’une grande majorité d’autres citoyens se seront vus convertis en marchepieds, propriétaires de rien. Il sera cynique de leur demander de considérer que les biens matériels ne font pas le bonheur. Il sera vain et cynique de chercher à les endormir par des rengaines mystico-religieuses ! Ils contesteront l’ordre existant ; ils menaceront les possédants dans leurs possessions parce que dès le départ, on aura donné comme aspiration fondamentale à tous l’accumulation de l’avoir. Là où existe l’inégalité, là où l’on renforce les inégalités naturelles, on ne peut que préparer des lendemains de contestation ; le libéralisme économique, au lieu de prendre en charge la nature, l’exacerbe et l’exaspère en croyant favoriser la liberté. Or, la liberté n’est liberté que quand elle discipline la nature et jamais quand elle se met à sa remorque ».


JALONS I (Recherche d’une mentalité neuve) Ed. CLE Ydé. 1970, pp. 37 -38

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PEUT-ON PREPARER L’AVENIR POUR DES GENERATIONS FUTURES ?

«  Quand la vision du monde au nom de laquelle on se bat choque et bouleverse de fond en comble l’ordre existant, l’opinion réactionnaire aura vite fait de la présenter comme irréalisable et impossible ; et au nom de cette impossibilité on la traitera encore de rêve creux de coureur d’idéal. A ce propos, je voudrais simplement dire, à la suite de Bergson, qu’il faut dissiper l’illusion que crée la logique de rétrospection. Une conception de l’ordre social sera dite impossible à réaliser et par conséquent relever du rêve jusqu’au jour où, quelque part, des hommes convaincus, des hommes d’action, mus par une foi bouillonnante en leur pouvoir et en leur rêve, la feront passer dans les faits. Alors seulement, on dira que ce rêve aura été possible, aura été réalisable. L’étiquette de rêve qui se colle à telle ou telle conception des choses sert plutôt à exprimer, comme avec une certaine gêne, un désaccord profond et honteux. Bien des adultes s’empresseront de traiter les jeunes de rêveurs pour ne pas avoir à s’humilier devant leurs leçons « impertinentes » d’idéalisme. Il s’agit pour la jeunesse contestataire de définir et de bâtir son propre monde plutôt que de continuer à vivre  dans un monde bâti par d’autres mains et d’autres cerveaux, et certainement pas pour elle ; car, bien que l’expression revienne souvent sur les lèvres de l’adulte, « préparer l’avenir de nos enfants », leur construire une société viable est une gageure. C’est André Gide qui a raison lorsqu’il dit à son élève Nathanaël : « Si je cherchais tes aliments, tu n’aurais pas de faim pour manger ; si je préparais ton lit, tu n’aurais pas sommeil pour y dormir…Jette mon livre, dis-toi bien que ce n’est là qu’une des mille postures possibles en face de la vie ». Oui, les adultes ne peuvent pas préparer aux jeunes une société dont ils soient sûrs qu’elle leur plairait. Et pourtant, les adultes sont bel et bien  obligés de préparer l’avenir de ceux qui n’ont pas encore les moyens requis pour se prendre eux-mêmes en charge. Mais est-ce là un motif suffisant pour que les adultes refusent de prêter l’oreille à ceux qui, devenus capables de penser pour eux-mêmes, proposent une révision parfois déchirante de ce qui leur avait été préparé ? ».
JALONS I (Recherche d’une mentalité neuve), Ed. CLE Ydé. 1970, pp.11-12

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L’ART, LA MORALE, LA CONTESTATION

           

Don Quichotte est bel et bien une œuvre d’art, au sens propre ; mais précisément il démontre que l’art a partie liée avec la morale, avec l’action de transformation du monde, bref, avec l’engagement. Ses excentricités expriment avec force le désir d’autre chose, une intention créatrice pour ne pas dire révolutionnaire. Qu’il s’agisse donc de l’agréable manière  par laquelle un aubergiste de son choix lui conféra l’ordre de la chevalerie ou de la promesse flatteuse qu’il fit à son paysan d’écuyer de le faire gouverneur d’une ile, qu’il s’agisse de pièces couvertes de rouille de sa vielle armure ou de son cheval Rossinante qui n’était plus qu’un squelette vivant mais jugé plus vigoureux que le bucéphale d’Alexandre ou le Babieça du Cid par lui-même, nous avons affaire à un renversement intentionnel des valeurs qui, pour être imaginaire, ne révèle pas moins le vice de l’ordre existant.
            Dans la vie courante, toutes proportions gardées, il existe des Don Quichotte réels qui sont aussi des œuvres d’art qui se contentent de contester en silence mais de contester fermement. Car, et c’est une chose à signaler, Don Quichotte est un contestataire silencieux qui agit par le seul fait d’exister et ne se préoccupe pas de parler. »
JALONS I (Recherche d’une mentalité neuve)Ed. CLE, Ydé. 1970, pp19-20.

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