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Ecrits portant sur les oeuvres de Njoh Mouelle

De la médiocrité à l'excellence

 Le bien-être et le bien-avoir (1)
 Le bien-être et le bien-avoir (2)
 Le sens du développement
 L’homme excellent

LE BIEN-ETRE ET LE BIEN-AVOIR (1) pp.79-81

L'expression bien-être est assez vague en elle-même ; " bien " est un adverbe qui détermine ( sans rien déterminer d'ailleurs) le verbe être ; mais que signifie " être bien " ? Rien de précis et cependant tout. Tout, car on est tenté de répondre par une énumération infinie :être bien nourri, bien logé, bien couvert, etc. .etc. Cette énumération est celle des besoins satisfaits, des manques comblés. Cependant, le bien-être ne se situe pas nécessairement au bout du compte parce qu'il n'est pas nécessaire de compter jusqu'au bout pour espérer obtenir le bien-être. Il y a en effet le compte des besoins fondamentaux et celui des besoins de luxe. La même question rebondit : que signifie chaque fois l'adverbe " bien " dans les expressions bien logé, bien nourri, bien couvert, etc, etc ? Un homme bien logé n'est pas simplement celui qui est assuré qu'aucun vent n'emportera sa demeure, qu'en temps de pluie il ne sera pas inondé, que les brigands et les animaux sauvages n'y pénétreront pas. Cela s'appelle être logé tout court. Autrement dit, avec le strict nécessaire on n'a pas l'optimum, le " bien ". Quand les conditions de sécurité primordiales sont réunies nous pouvons tout au plus parler de la garantie d'être, d'exister, et non du bien-être, ni du bien- exister. Le bien-être ne saurait donc être ramené à la jouissance de ma sécurité, c'est-à-dire à la certitude de vivre demain et après-demain. Il découle de cela que la satisfaction des besoins fondamentaux ne garantit pas le bien-être mais seulement l'être. Et le luxe véritablement humain est celui de la qualité ; car le problème du bien-être et du bonheur concerne, non pas le simple fait mais la manière, bonne ou mauvaise, humaine ou bestiale, libre ou soumise, d'exister. Nous voudrions en dire ce qu'on dit souvent de la double naissance de l'homme : la naissance simplement biologique et la naissance à la raison. De la même manière que l'enfant renaît d'une naissance véritablement humaine en accédant à l'âge de raison, l'homme ne commence à exister vraiment que lorsqu'il accède au souci de la qualité de l'existence qu'il veut mener. Par conséquent la recherche de la qualité ne serait un luxe que pour un point de vue de sous-homme ou d'animal, pour qui la victoire quotidienne sur la mort, la sécurité élémentaire sont les seuls et vrais soucis. La recherche du bien-être ne répond donc pas directement au besoin fondamental de sécurité mais à un autre besoin qui prend appui sur celui de la sécurité pour se satisfaire :l'accomplissement total de soi. Il y a en effet une différence entre exister banalement, en dessous de ses potentialités et exister pleinement, en se réalisant, en " se faisant " chaque jour davantage que le jour précédent. Dans l'existence banale et médiocre on se contente du seul fait de vivre, biologiquement parlant, tandis qu'avec la considération du bien-être apparaît quelque chose comme une insuffisance du seul fait de vivre. Vivre, tout court, ne satisfait pas l'homme. Et cette insatisfaction est créatrice, car c'est grâce à elle que la liberté trouve l'occasion de se manifester non seulement en imaginant une seconde manière de vivre non biologique, mais encore et surtout en entreprenant de réaliser effectivement cette seconde manière. Si donc nous distinguons entre le vivre biologique et le vivre humain, nous sommes amenés à distinguer également entre deux formes de sécurité :la sécurité- conservation de la vie et la sécurité - accomplissement et conservation de l'humain. Dans la première forme, il s'agit exclusivement de conserver et sauvegarder un acquis : la vie, " le souffle ", si on veut ; tandis que dans la seconde forme, il s'agit de conquérir d'abord l'humanité, le vivre- homme, pour ne s'inquiéter de sa conservation que par la suite.

" De la médiocrité à l'excellence "
(Essai sur la signification humaine du développement)
Editions CLE Yaoundé, pp.67 - 68

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LE BIEN-ETRE ET LE BIEN-AVOIR (2) p. 82

L'on n'est bien que lorsqu'on a bien et qu'on se fait tel qu'on ait suffisamment. Avoir suffisamment ou avoir bien n'est pas bien avoir. Avoir bien c'est avoir beaucoup, en quantité plus que suffisante. Bien avoir comme bien-être ne désignent qu'une manière et non une quantité d'être ou d'avoir. Cependant l'avoir détermine l'être, la quantité modifie la qualité. Et rien d'étonnant à ce que le bien-être soit d'abord conçu comme essentiellement matériel. Est bien celui qui a réponse facile aux problèmes quotidiens de l'existence. Nous disons bien qu'il a réponse facile à tout ; il ne s'agit pas de réponses verbales mais plus exactement d'objets, de choses, de " biens " ayant pour fonction de combler les manques, d'assouvir les besoins divers, de supprimer, momentanément, le désir. On ne peut avoir ces objets- réponses que si on les acquiert, si on les conquiert, bref, si on les fait ou les fabrique. Dans la bataille du développement à laquelle l'Afrique Noire est attelée, l'objectif le plus apparent est l'amélioration du sort matériel des hommes. Il est question pour ceux-ci d'avoir des habitations saines, des baignoires, des téléphones, des automobiles, etc, etc ; la liste des objets-réponses à acquérir est longue. La recherche du bien - être se présente donc comme la recherche d'une aisance qui seule permettrait à l'homme d'oublier le harcèlement des impératifs de la sécurité élémentaire pour se consacrer à lui-même.

De la médiocrité à l'excellence
Essai sur la signification humaine du dévelopement
Editions CLE, Yaoundé p.68-69

 

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LE SENS DU DEVELOPPEMENT p. 153-154

Quand donc nous affirmons que le développement ne saurait se concevoir comme l'entreprise de résolution définitive de nos problèmes nous voulons attirer l'attention sur la nécessaire distinction qu'il convient d'établir entre les illusions de solutions que représentent les réalisations matérielles et techniques d'une part et, d'autre part, les véritables solutions qui consisteraient en la transformation réelle de l'homme. Et c'est cette transformation de l'homme déjà dénommée précédemment réalisation de soi, épanouissement ou promotion de l'excellence que nous présentons pour notre part comme une entreprise interminable et néanmoins entreprise essentielle. On comprendra donc que nous nous attachions à écarter de l'esprit de l'homme toute idée de repos définitif sous forme de bonheur dans la jouissance facile des réalisations matérielles et techniques. Aussi, l'excellence de l'homme ne saurait être envisagée comme un état auquel on accèderait définitivement. De même qu'un homme médiocre peut, si les conditions et les circonstances lui sont offertes, se hisser au-dessus de lui-même et accéder à l'excellence, de même un homme excellent pourrait retomber dans la médiocrité à partir du moment où il considèrerait qu'il a réalisé son programme. Mais comment concevoir qu'une excellence au centre de laquelle nous plaçons comme vertu cardinale la créativité, puisse se prendre elle-même comme un terme sans se renier ?L'excellence n'est excellence qu'aussi longtemps qu'elle se réaffirme tous les jours à travers ses œuvres. Il en est à peu près comme de la foi dont parlent les évangiles. La foi n'est pas une chose qu'on acquiert une fois pour toutes et qu'on pourrait conserver en sécurité dans un coffre quelconque. Elle se prouve de nouveau tous les jours à travers les œuvres.

Cela est vrai de l'humanité de l'homme. Certes nous avons insisté sur l'idée selon laquelle l'homme n'est pas une donnée naturelle mais une conquête culturelle. Le devenir-homme est un programme pour tout un chacun ; mais cette conquête, la réalisation de ce programme sont à reprendre tous les jours. Nous pouvons ainsi dire que la fonction du développement est double : promouvoir l'excellence de l'homme en réduisant la médiocrité et fournir en permanence à l'excellence ainsi promue les conditions chaque fois nécessaires à sa réaffirmation.

De la médiocrité à l'excellence
Essai sur la signification humaine du développement
Editions CLE, Yaoundé p. 153-154

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L'HOMME EXCELLENT ( p. 159-161)

" L'homme excellent, en tant qu'il prend des initiatives novatrices, engage le sort de ses semblables.. Il ne saurait lui être interdit de vouloir son propre bien, mais alors, il doit agir de telle sorte que vouloir son propre bien ne contredise pas le bien des autres ; en d'autres termes vouloir son propre salut et vouloir le salut de ses semblables doivent être une seule et même chose. Il n'est responsable que parce qu'il est apte à la liberté ; et si sa recherche de la liberté devait nuire à la libération des autres, il ferait échec par là même à sa propre libération et se dénoncerait comme indigne de la responsabilité de l'humain. L'homme créateur que nous cherchons est donc un homme sur qui pèse une fort lourde responsabilité. Il doit accepter de créer des valeurs pratiques qui puissent se donner comme modèles. Il n' y a pas, ici comme ailleurs, d'échappatoire sans trahison. En des chapitres précédents, nous avons montré comment l'Africain de l'Afrique sous-développée ignorait l'étendue de sa responsabilité. C'est l'homme qui s'abandonne, consciemment ou inconsciemment aux forces occultes, au destin, aux dieux. Se dépouillant ainsi de sa véritable responsabilité, il se dépouille aussi la plupart du temps de son privilège de créer : Dieu y pourvoira, le sorcier y pourvoira, les ancêtres y pourvoiront ! Nul doute que c'est un homme à qui il faut enseigner l'homme. A l'origine de ses nombreuses superstitions nous avons placé l'ignorance, l'incapacité d'expliquer et aussi la crainte. Mais la crainte elle-même naît de l'ignorance qu'il a de son pouvoir réel sur les choses. C'est cette ignorance qui doit être remplacée par la connaissance, du moins, la recherche sûre de la vérité. "

De la médiocrité à l'excellence,
Essai sur la signification humaine du développement
Troisième édition, CLE Yaoundé 1998 pp.159-160

 

 

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